Vigilance météo
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Quand la météo écrit l'Histoire : Napoléon 0 - Météo 3

Second volet de ce dossier "Quand la météo écrit l'Histoire" : après avoir évoqué dans le premier volet comment des phénomènes météorologiques remarquables ont marqué les populations de France, du nord surtout, les mois qui ont précédé la Révolution française, nous revenons à présent sur la période des guerres napoléoniennes du début du XIXe siècle.
Ici aussi, nous allons le voir, la météo aura joué un rôle, parfois majeur, pour au moins trois batailles, toutes perdues par l'empereur Napoléon Bonaparte. 
Voici leurs histoires.

Peinture montrant Napoléon Bonaparte, empereur conquérant.
Source : Pixabay

Préambule  : le contexte politico-historique de l'époque

Les guerres napoléoniennes (1803-1815) s'inscrivent dans une période de bouleversements majeurs en Europe, marquée par les suites de la Révolution française (1789-1799) et la montée au pouvoir de Napoléon Bonaparte. La Révolution a non seulement aboli la monarchie en France, mais elle a aussi diffusé des idées nouvelles de liberté, d'égalité et de souveraineté populaire, suscitant l'inquiétude des monarchies européennes.

Contexte politico-historique
Napoléon, d'abord général, devient empereur en 1804 et cherche à étendre l'influence française en Europe en y exportant les idéaux révolutionnaires, tout en consolidant son propre pouvoir. Ses ambitions expansionnistes provoquent une série de coalitions militaires regroupant les grandes puissances européennes — Royaume-Uni, Autriche, Prusse, Russie et parfois l’Espagne — qui tentent de contenir et de renverser l’empire français.

Les guerres qui en découlent redessinent les frontières européennes et modifient les dynamiques de pouvoir. Napoléon remporte plusieurs victoires importantes (Austerlitz, Iéna), mais ses revers en Espagne (Trafalgar) et, plus tard, l’échec de sa campagne de Russie en 1812, affaiblissent l'Empire. La défaite finale à Waterloo en 1815 met fin aux guerres napoléoniennes, et le Congrès de Vienne (1814-1815) rétablit les monarchies européennes et redessine les frontières pour instaurer un nouvel équilibre politique en Europe.


Acte I : la bataille de Trafalgar

La bataille de Trafalgar est un affrontement naval majeur de l'époque, qui a eu lieu le 21 octobre 1805 près du cap Trafalgar, au sud de l'Espagne. Elle oppose la flotte britannique, commandée par l'amiral Horatio Nelson, à une coalition franco-espagnole (la Grande Armée) dirigée par Pierre-Charles Villeneuve et Federico Gravina.

Contexte
En 1805, Napoléon Bonaparte projette d’envahir l’Angleterre pour mettre fin à la menace britannique contre son empire. Cependant, pour mener cette invasion, Napoléon doit sécuriser le contrôle de la Manche, ce qui implique de neutraliser la Royal Navy britannique. Pour atteindre cet objectif, il ordonne à la flotte franco-espagnole de quitter le port de Cadix et d’engager les forces britanniques.

Résumé de la bataille
Déroulement : Nelson divise sa flotte en deux colonnes pour pénétrer les lignes franco-espagnoles. Cette stratégie innovante, quoique risquée, permet de désorganiser l'ennemi et d'éviter les tirs en enfilade.
Issue : La flotte franco-espagnole subit une défaite écrasante, perdant 22 navires, contre zéro pour les Britanniques. Cependant, Nelson meurt lors de cette victoire décisive.

Conséquences
La victoire de Trafalgar garantit la suprématie maritime britannique pour plus d'un siècle, mettant fin aux ambitions navales de Napoléon et sécurisant les routes commerciales de l'Empire britannique. Elle change le cours des guerres napoléoniennes, obligeant Napoléon à renoncer à ses projets d'invasion de l'Angleterre. 

Le rôle de la météo dans la bataille
Si le mérite de la victoire revient sans conteste au génie militaire de l'amiral Nelson, les conditions météorologiques auront quand même joué un rôle : une tempête se déclencha au moment où l'escadre de Pierre-Charles Villeneuve venait protéger la Grande Armée chargée du débarquement ; l'escadre fut refoulée... On connait la suite. 

Source : Pixabay

Acte II : la campagne de Russie et la bataille de la Bérézina

La bataille de la Bérézina est un épisode dramatique de la retraite de Russie par la Grande Armée de Napoléon, qui s'est déroulé du 26 au 29 novembre 1812 près de la rivière Bérézina, en Biélorussie actuelle.

Contexte
En 1812, Napoléon entreprend une campagne en Russie avec une armée massive de plus de 600 000 soldats, la Grande Armée, dans le but de contraindre le tsar Alexandre Ier à respecter le Blocus continental et à renforcer l’alliance franco-russe. Cependant, la campagne tourne au désastre : les troupes russes pratiquent la politique de la terre brûlée, privant les Français de ressources locales, et l'hiver russe décime les troupes napoléoniennes.

En novembre, la Grande Armée, réduite à une fraction de ses forces initiales, tente de revenir en Europe centrale, mais elle se retrouve coincée sur les rives de la Bérézina en Biélorussie, poursuivie par l’armée russe. Napoléon doit trouver un passage pour traverser la rivière sans pont, sous la menace d’un encerclement.

Résumé de la bataille
Déroulement : Grâce à l’ingéniosité du général Eblé, des ponts de fortune sont construits sous des conditions glaciales et sous le feu de l’artillerie russe. Après plusieurs jours d'affrontements intenses et de scènes de chaos, une partie de la Grande Armée parvient à traverser, mais des milliers de soldats et de civils périssent dans la rivière ou sous les attaques russes.
Issue : Bien que Napoléon échappe à l'encerclement, cette traversée marque un désastre humain et militaire. Environ 25 000 à 30 000 hommes périssent à la Bérézina, et la Grande Armée sort irrémédiablement affaiblie de la campagne de Russie.

Conséquences
La traversée de la Bérézina symbolise l'échec de l’invasion de la Russie et constitue un tournant dans les guerres napoléoniennes. La France perd son statut de puissance militaire dominante en Europe, tandis que l'Europe entière se prépare à la coalition contre Napoléon, qui aboutira finalement à sa défaite en 1815. 

Le rôle de la météo dans la bataille 
Le tsar de Russie de l'époque, le tsar Alexandre, ayant connaissance des intentions guerrières de Napoléon avait pourtant prévenu l'ambassadeur de France : "si vous envahissez la Russie, notre climat et notre hiver feront la guerre pour nous". D'origine corse, notre empereur habitué aux hivers méditerranéens fera fi de la mise en garde.
Pire, les soldats n'étaient pas préparés pour un tel climat: sans gants, sans bonnets, les hommes furent victimes par dizaines milliers du froid et de la privation de nourriture consécutive à la politique de la terre brulée des Russes. 
Il n'eut bientôt plus d'autre choix que de battre en retraite, la Grande Armée complètement affaiblie et en déroute, poursuivie par l'armée russe, fut bloquée par la Bérézina, déjà à moitié gelée : trop froide pour la traverser, pas assez froide pour que la couche de glace permette le passage des soldats à pied.

La traversée de la  Bérézina
Huile sur toile de Janvier Suchodolski, 1866.
Source : Wikipedia

Acte III : la bataille de Waterloo

La bataille de Waterloo, qui a eu lieu le 18 juin 1815 près du village de Waterloo en Belgique, marque la fin des guerres napoléoniennes et scelle la chute définitive de Napoléon Bonaparte. Elle oppose l'armée française à une coalition formée par les Britanniques, dirigés par le duc de Wellington, et les Prussiens, commandés par le maréchal Blücher.

Contexte
En 1815, après son exil sur l'île d'Elbe, Napoléon revient en France pour reprendre le pouvoir lors des Cent-Jours. Ses ambitions sont de restaurer son empire et de défaire les puissances européennes coalisées contre lui. La coalition (Royaume-Uni, Prusse, Autriche et Russie) prépare une armée pour envahir la France, et Napoléon décide de lancer une offensive préventive en Belgique pour battre les forces alliées avant qu'elles ne puissent se regrouper.

Résumé de la bataille
Déroulement : Le 18 juin 1815, après de fortes pluies orageuses, le champ de bataille est boueux, retardant l’assaut de Napoléon. En fin de matinée, les Français attaquent les positions britanniques autour de la ferme de La Haye Sainte et de Mont-Saint-Jean, mais les Britanniques tiennent bon. Dans l’après-midi, les Prussiens arrivent en renfort, et leur attaque par l’est déstabilise l'armée française.
Issue : Napoléon lance une dernière attaque avec sa Garde impériale, mais elle échoue. Les troupes françaises sont mises en déroute par la coalition anglo-prussienne. Napoléon abdique une seconde fois après cette défaite et est exilé définitivement à Sainte-Hélène.

Conséquences
La bataille de Waterloo met fin au règne de Napoléon et à son empire, et elle inaugure une période de paix en Europe, marquée par le Congrès de Vienne. La victoire alliée consolide la suprématie du Royaume-Uni et inaugure une période de stabilité relative en Europe, tandis que la France voit son influence militaire et politique considérablement diminuée.

Le rôle de la météo dans la bataille
Le 17 juin 1815 un violent orage détrempa le sol. Les soldats, épuisés, furent contraints à bivouaquer, les champs de seigle étant complètement inondés et la boue ne permettant plus de déplacer les canons. Le lendemain, les terrains étaient encore trop boueux pour permettre le déplacement des pièces d'artillerie, l'empereur fut contraint de retarder l'offensive et ce retard lui fut fatal. Comme évoqué ci-dessus, les troupes prussiennes eurent le temps d'arriver sur le champ de bataille et d'ainsi prêter main forte aux Anglais. 

Source : Pixabay

Epilogue

Napoléon Bonaparte ne s'est jamais préoccupé des conditions météorologiques, pour lui elle était "juste bonne à faire peur aux petits enfants".
Bien mal lui en a pris, nous l'avons vu ci-dessus.
On l'avait prévenu de la rudesse des hivers russes, il n'a pas voulu s'en soucier. La Bérézina est restée dans les mémoires et a donné naissance à une expression française signifiant que tout est perdu et que l’échec est complet et définitif.

On dit que celui qui ne connait pas l'histoire est condamné à la revivre. 
Napoléon a commis une grossière erreur en envoyant ses troupes en Russie en automne. L'hiver ne pardonne pas dans ces contrées. L'armée allemande s'est aussi opposée au général Hiver en Russie durant la première guerre mondiale en fin 1915. 
En fin 1942,lors de la seconde guerre mondiale, les armées allemandes du front russe ont elles aussi été vaincues par la rudesse de l'hiver russe, on se souviendra particulièrement de la bataille de Stalingrad.

Pour terminer, notons encore que le mauvais temps lors de la bataille de Waterloo pourrait avoir comme cause la terrible éruption du volcan Tambora en Indonésie quelques mois plus tôt, en avril 1815, la plus puissante éruption volcanique des ces 700 dernières années au moins. Cette éruption majeure a fait baisser les températures moyennes durant de nombreux mois, avec dans un premier temps une augmentation des précipitations. C'est d'ailleurs sans doute la cause de la fameuse année 1816, année sans été (voir notre article à ce sujet ici).

La Butte du Lion est un monument commémoratif érigé pour marquer la bataille de Waterloo du 18 juin 1815. Construite entre 1824 et 1826, cette colline artificielle de 40 mètres de hauteur est surmontée d’une statue de lion en bronze, symbole de la victoire anglaise. On peut y accéder par un escalier de 226 marches, offrant une vue panoramique sur le champ de bataille.
Source : Pixabay

Sources :

- Météo, question de temps, René Chaboud, éditions Nathan
- Wikipedia

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